Oh Bigre! (bar à vin)

4, rue Bridaine - Paris XVIIème, le 17 février 2009

Profitant d'un coffret cadeau (que je ne nommerai pas ici), sur le thème des bars à vin, nous avons, ma femme et moi choisi un établissement parisien au nom surprenant (Oh Bigre!) mais ce ne fut pas le seul critère. Plus que la quantité de verres de vin proposés, nous voulions aussi bien manger et ce bar proposait un petit plus: un commentaire sur les accords mets et vin.

En plein quartier des Batignolles, Oh Bigre! est avant tout un petit établissement convivial et sans chichis. L'accent est mis sur les vins servis et non sur un cadre sophistiqué ou une quelconque ambiance lounge à la mode.

Pour débuter, une assiette de saucisson nous est servie, ainsi qu’une bouteille de vin rouge que le maître des lieux nous demande de ne pas regarder: surprise, c’est une dégustation à l’aveugle (mon jeu préféré).

Accord charcuterie/vin rouge

Un verre en main chacun (ainsi que notre amphitryon), nous somme invités à sentir les arômes du breuvage. Des notes poivrées et de sous-bois, une robe claire, je désigne un peu au hasard le cépage Gamay, et mets dans le mille! En même temps, avec la charcuterie, c’était tout indiqué. Notre hôte nous apprend par la suite que c’est un Morgon, un des crus du Beaujolais, que nous sommes en train de savourer.

L’homme est très prolixe, car pêle-mêle nous nous voyons conter moult anecdotes et secrets de fabrication du vin, notamment la volonté de la maison de travailler avec des vignerons rompus aux techniques les plus naturelles qui soient, et qui se gardent d’utiliser jusqu’aux 500 additifs parfois employés dans l’industrie du vin (à vérifier, mais c’est plausible).

Accord fromage/vin blanc

Pour la seconde dégustation, des morceaux de Comté agrémentés de noix et de raisins secs nous sont servis, avec un verre de vin blanc. Cette fois-ci, le voile est vite levé car un indice précieux nous est livré: le vin provient de la région de production du fromage… C’est le Jura, non?

En effet, nous dégustons un Côtes du Jura aux effluves de miel (allant jusqu’à la cire), de pain grillé et de viennoiseries. Contrairement au précédent accord, il nous est demandé de boire le vin avec le fromage en bouche: c’est alors un véritable ping-pong où vin et fromage s’enrichissent mutuellement, et à la rétro-olfaction, les arômes de pâtisserie et de noix sont encore soulignés.

Plus long en bouche que le premier, le vin est plus gourmand aussi.

Pour résumer, nous avons passé une très bonne soirée, entre de bonnes mains et à la bonne franquette.

Oh Bigre! Même aux toilettes, un petit poème insolite ne manque pas de distraire les messieurs debout:

Heureux qui comme Ulysse

Loin du bruit de la guerre

Baise un petit cul

Et boit dans un grand verre.

Vide l'un, emplit l'autre,

Et passe avec gaieté

Du cul de la bouteille

Au cul de la beauté.

Meursault Roux Père & Fils 2005

N'y tenant plus, je me décide à ouvrir ce week-end la bouteille la plus prestigieuse de ma cave. Dimanche matin, jour de marché, je choisis un poisson rare à la chair fine pour l'accompagner: un turbo de Bretagne. Au four le midi, poêlé pour le repas du soir.
Une fois le précieux breuvage bourguignon versé, il laisse apparaitre une belle couleur dorée, un peu pâle, mais très attrayante. Déjà, les bords du verre présagent d'une teneur alcoolique élevée.
La première olfaction est très intense: c'est un vin puissant. Un fort arôme d'ambre teinté de brioche, tout en fraicheur et en vivacité surprend au premier abord. Je n'ai pas l'habitude de sentir un tel parfum, c'est très déconcertant, mais pas désagréable.
En bouche, c'est une confirmation grandiose: non seulement le vin est d'un équilibre parfait entre alcool, acidité et sucres, mais il se paye le luxe de posséder une finale exceptionnellement longue, trente secondes de pur bonheur beurré et caramélisé, d'une finesse rare.
Les arômes ne sont finalement pas sans rappeler un certain Gewurztraminer Kuehn 2006 Cuvée Sainte-Marguerite, en plus subtils et délicats.
Bref, un vin d'une grande noblesse, sûrement dégusté un peu jeune, et qui triomphera de plus belle après de longues années de garde.

Note provisoire: 4,5/5

Pommard Gilbert & Philippe Germain 2005

Ce dimanche, c'était Bourgogne... Une fois n'est pas coutume, la rareté de ces vins fait que nous savons les apprécier lorsqu'ils passent à portée de nos papilles. Pour accompagner notre poulet fermier rôti, nos invités sont venus avec un Pommard dégoté chez un caviste parisien : un millésime 2005 de Gilbert & Philippe Germain.
Cette dégustation d'une AOC de la Côte de Beaune fut une première, en ce qui me concerne. Et elle fut à la hauteur de sa réputation: une jolie robe soutenue, un nez de fruits rouges et de sous-bois, des tanins élégants et fondus, bref, un enchantement mémorable.
J'ai un petit penchant pour les grands Bourgognes pas trop vieux, mais nul doute que ce domaine Gilbert & Philippe Germain a su tirer parti du meilleur du Pinot Noir, et qu'un vieillissement approprié le portera au sommet.

Note: 4,5/5

Merci Julie & Guillaume!

Bourgogne

La région viticole bourguignonne regroupe des terroirs, et donc des vins très différents: sa vaste étendue géographique embrasse des latitudes variées, depuis la région d'Auxerre jusqu'aux environs de Lyon.

Les cépages utilisés sont le Pinot noir et le Gamay pour le rouge, le Chardonnay et l'Aligoté pour le blanc.

Les appellations régionales
La gamme des appellations régionales est produite dans tous les vignobles de bourgogne détaillés plus loin. On en dénombre quatre:
- Bourgogne (rouge, rosé ou blanc): des caractéristiques différentes suivant la zone de production et les cépages utilisés (Chardonnay, Pinot noir et césar dans l'Yonne).
- Bourgogne Aligoté (blanc): très apprécié à l'apéritif, seul ou en kir. C'est un vin tendre qui développe des arômes floraux et fruités (pomme, agrumes), une finale de noisette.
- Bourgogne Passe-tout-grain (rouge ou rosé): son nom vient du fait que les deux cépages Pinot noir et Gamay entrent dans son élaboration. Cette association engendre des vins fruités et légers, au style différent suivant la proportion de l'assemblage et le terroir d'origine.
- Crémant de Bourgogne (blanc ou rosé): vin effervescent sec ou demi-sec, de méthode traditionnelle, issu du Chardonnay et/ou du Pinot noir.

Chablis et Grand Auxerrois

Le vignoble de Chablis produit de fameux vins blancs secs exprimant bien la rudesse du climat (saisons très marquées) et des sols caillouteux et argilo-calcaires. Le cépage Chardonnay y produit des vins généralement minéraux, allant parfois jusqu'au goût de poudre ou de silex. L'acidité est bien marquée, et pour les meilleurs d'entre eux, c'est un gage de bon potentiel de garde. On y trouve des arômes de fleurs blanches, voire de miel à leur maturité.
Les conditions climatiques étant très changeantes d'une année à l'autre, les millésimes sont donc assez différenciés.
Les AOC sont classées suivant la situation de leurs vignobles s'étalant autour de la ville de Chablis, de part et d'autre du Serein: Petit Chablis, Chablis, Chablis Premier Cru et Chablis Grand Cru dans l'ordre croissant de prestige (et de valeur de la bouteille).

Le vignoble du Grand Auxerrois regroupe quelques appellations d'étendue plus vaste, notamment autour des villes d'Auxerre, le long de l'Yonne, et de Tonnerre. On y produit des vins rouges et blancs secs: Bourgogne Côtes d'Auxerre, Irancy, Saint-Bris, pour ne citer que ces appellations.
Le vignoble du Châtillonnais situé plus à l'est, à la limite de la Champagne, produit des appellations régionales.

Côte d'Or (Côte de Nuits et Côte de Beaune)
La bourgogne est marquée par un terroir très particulier: ses caractéristiques peuvent varier très fortement d'une parcelle de vignoble à l'autre - comme à Chablis. Ainsi, deux vins voisins pourront s'avérer très différents, biens qu'issus des mêmes cépages (le Pinot noir et le Chardonnay), ici très bien acclimatés et exprimant toutes leurs qualités.
Le Pinot noir donne aux bourgognes rouges une robe peu foncée, des tanins modérés, et des arômes caractéristiques de fruits rouges (cerises, baies), de terre humide et de champignons. Il est parfois également vinifié en rosé.
Dans ce terroir plus méridional que le chablisien, le Chardonnay s'épanouit sur des notes beurrées, noisettées, florales et de miel suivant les vins (l'acidité vivace leur confère d'ailleurs un bon potentiel de garde pouvant dépasser la décennie).
Y ont été consacrées quelques prestigieuses appellations, citées ci-après du nord au sud, en commençant par la Côte de Nuits: des crus rouges charpentés et distingués, tels Marsannay, Vougeot, Vosne-Romanée, Nuits-Saint-Georges, puis la Côte de Beaune, terre de grands blancs et de rouges élégants: Aloxe Corton, Pommard, Volnay, Meursault...

Côte Chalonnaise et Mâconnais
Au sud de la Côte d'Or se trouve la Côte Chalonnaise, qui abrite des crus moins auréolés que sa voisine septentrionale, et donc des vins (rouges et blancs) moins onéreux, mais cependant très aromatiques et délicats, comme les Rully, Mercurey, ou encore Givry.

Encore plus au sud, le Mâconnais jouit d'un climat plus doux et ensoleillé. Outre ses vins rouges, il est surtout connu pour ses blancs parfumés et envoûtants, tels le Saint-Véran et le Pouilly-Fuissé, des vins aussi plus abordables que leurs illustres voisins de Côte d'Or.

Beaujolais
Entre la Vallée du Rhône et la Bourgogne se trouve le vignoble du Beaujolais, célèbre pour ses vins ronds et fruités issus du cépage Gamay. Outre le Beaujolais nouveau, qui nous offre la primeur de ses arômes fruité et de sa gouleyance tous les mois de novembre, les appellations de Beaujolais Villages, et surtout les dix crus du Beaujolais, peuvent s'avérer de bons représentants de cette région ensoleillée: Brouilly, Chénas, Chiroubles, Côte-de-Brouilly, Fleurie, Juliénas, Morgon, Moulin à Vent, Régnié, et Saint Amour, exprimant chacun un terroir différent, avec plus ou moins de bonheur. Certains se révèlent même très élégants, et aptes à quelques années de vieillissement.